Lorsque j’ai commencé à voyager pendant des longues périodes puis que je suis partie marcher sur le Chemin de Compostelle, j’ai vite compris qu’il ne suffisait pas d’être en voyage pour se sentir bien. On peut être face au plus beau coucher de soleil, marcher dans une magnifique forêt ou au bord d’une plage paradisiaque, et se sentir vide, seul, triste. 

Le bonheur et le malheur sont transportables. On les emporte sur notre dos partout où on va comme on porte un sac à dos.

« L’esprit est sa propre demeure, il peut faire du paradis un enfer et de l’enfer un paradis ».

John Milton

La bonne nouvelle dans tout ça, c’est qu’on peut travailler à se construire son paradis en soi.

Et le fait de voyager seul peut être un bon contexte pour y travailler. Lorsque je marchais seule sur le Chemin, notamment au début quand j’ai traversé l’Alsace et qu’il n’y avait pas d’autres pèlerins, j’observais très clairement les émotions – agréables ou désagréables – et les pensées qui pouvaient m’habiter. La marche est rapidement devenue une expérience méditative où j’essayais d’accueillir mes émotions, de plonger dedans plutôt que les éviter, d’y faire face. Tant que je ne faisais pas pleinement face à ce qu’il se passait en moi, mes états d’âme restaient présents en arrière-plan, comme des fantômes. Et ils disparaissaient une fois que je les accueillais pleinement et que je prenais l’information qu’ils avaient à me donner. Se construire son paradis, c’est aussi être à l’écoute de ce qui nous met en joie, ce qui nous fait vibrer et décider de le faire, d’en donner la priorité.

Je crois qu’il n’y a pas de réelle échappatoire extérieure à ce qui nous traverse, la seule échappatoire est intérieure.